Mémoires du chat Gaspard.

J'avais un ami.Il s'appelait Bas-Rouges. C’était un chien de berger noir,
au poil rude,dont le bout des pattes était de couleur feu.De là son nom.

    Bas-Rouges était un bon chien et un bon camarade.Le jour,il veillait
sur les vaches de la mère Bûchenbois ;la nuit il gardait la maison.Et il
s’acquittait for bien  de ces deux missions de confiance. Entre temps ,
il dormait dans une niche qu'il avait à la porte de la cuisine.

   Nous nous aimions.

  Il m’arrivait très souvent de m'endormir entre ses pattes,après avoir joué
avec lui.La mère Bûchenbois avait suspendu le long de la niche de Bas-Rouge,
au bout d'une ficelle,un bouchon que je faisais balancer  avec ma patte.
Bas-Rouges me regardait faire avec le plus grand des
sérieux et s amusait de mes cabrioles,comme une maman des jeux de
son enfant.Parfois ,il m'arrivait,  histoire de rire et d'essayer mes griffes,
de lui égratigner légèrement le museau; mais il ne s'en fâchait pas et
m'écartait doucement avec sa patte,sans même gronder comme il
faisait  fréquemment avec ceux  qui lui déplaisait.

 La première fois que je me trouvai en présence de Bas-Rouges,
un mouvement instinctif me porta  à prendre  la fuite;lui eut pour
première idée de me casser les reins d'un coup de gueule.Je peut dire
que j'eus grand-peur.Mais la mère bûchenbois arrangea les choses .
Caressant la tête de Bas-rouges d'une main,elle me présenta  à lui de
l'autre.Bas-rouges gronda , je mis toutes mes griffes en avant,
faisant : pff ! pff!


La mère Buchenbois fit taire Bas-rouges ,elle le fit coucher et elle me
déposa ,en me caressant à mon tour,entre ses pattes de devant.
Bas-rouges ne gronda plus ;ma peur se passa,je fis ronron;Bas-rouges
me passa sa langue sur le dos .

C'est ce jour-là que date notre amitié.
                                                                  Louis Gobelet.
                                                   Mémoires de Gaspard.(ed. Delagrave.)